Page loading
Thomas Braun
des fromages
8 pages,
format 11,2 x 9 cm.
tirage à 131 exemplaires en typographie.
CLS
Un volumen,
79 cm de long, 17,5 cm de haut.
tirage à 10 exemplaires en linogravure.
Marie-Rose de France
26 petits textes en proses poétique. Vignettes de CLS.
tirage à 120 exemplaires en typographie au plomb.
Pierre Pinelli
24 pages,
format 15 x 20 cm.
tirage à 100 exemplaires en typographie au plomb.
Authors
Chronological
Des barbares...
Entertainments
Fin-de-Siècle
Fourneau and Fornax
Museums
Printings
Typography
... for those who are too lazy to seek.
10998922 visitors
43 visitors online
Several wordsmiths [4] - by cls
Ça y est, on y revient... À quoi ? Aux romans à plusieurs plumes, pardi ! Et là, on a de la chance, toute la genèse de la chose a été consignée dans la presse de l’époque.
L’idée du Roman des quatre a germée dans la tête d’un éditeur de revue, le patron des Annales politiques et littéraires, Adolphe Brisson. Le numéro du 11 décembre 1921 de cette revue nous en informe :
Quelques-uns de nos projets Littéraires
Nous ne pouvons, aujourd’hui, que les énumérer brièvement. Nous les ferons bientôt connaître avec plus de détails.
Les Romans des « Annales »
Le « Roman des Quatre »
L’adjonction de huit pages au numéro nous a permis de réaliser le désir maintes fois exprimé par les lecteurs. Une revue ne saurait se passer d’un bon roman. D’abord, nous nous sommes naturellement adressés aux maîtres du genre. Après Edmond Haraucourt, voici Charles Foley, dont nous commençons aujourd’hui Cabotinette, étude de mœurs parisiennes, tableau véridique, satirique et gai du petit monde des théâtres, propre à attirer la jeunesse et qui lui réserve de si cruelles déceptions.
Ensuite, viendra une œuvre très originale dont l’histoire vaut la peine d’être contée.
Dernièrement, un vieux volume, paru en 1849, tomba sous les yeux du directeur des Annales. C’était la Croix de Berny, roman par lettres, dû à la collaboration de Théophile Gautier, Mme de Girardin, Méry et Jules. Sandeau... Ne serait-il pas piquant de reprendre cette idée couronnée, il y a soixante-douze ans, d’un éclatant succès ?... Notre éminent ami Paul Bourget, interrogé, trouva le projet à son gré et s’en amusa beaucoup. Le rôle de « chef d’équipe » que tenait jadis Théophile Gautier lui revenait de droit. Restait à choisir les autres travailleurs. Ce fut l’objet d’une importante délibération.
— Qui sera Mme de Girardin ? demanda-t-on à Bourget.
Sans hésiter, il répondit :
— Mme Gérard d’Houville.
— Et Méry ?
— Si l’on parlait à Pierre Benoit.
— Et Jules Sandeau ?
— Henri Duvernois... Mais voudra-t-il ?
Tous voulurent... Tous se réjouirent de besogner côte à côte et de trouver, dans ce commerce momentané, l’occasion de se voir, de penser ensemble... Une tâche préalable s’imposait : arrêter d’un commun accord le scénario. Plusieurs furent esquissés, puis abandonnés. Il en est un qui réunit l’unanimité des suffrages... Immédiatement, le travail commença... Un des « quatre » est en train de faire la première lettre... Un autre fera la seconde... Et ainsi de suite, chacun des quatre écrivains incarnant un des quatre personnages essentiels du récit et obéissant, quant aux développements de détail, à son inspiration personnelle... Nous vous dirons plus tard comment l’œuvre aura été construite, quels efforts aura coûtés son enfantement. Elle ne peut manquer d’être curieuse et remarquable, puisque des talents supérieurs et des tempéraments divers y auront coopéré...
Il n’est pas besoin d’essayer de prouver une filiation entre les deux œuvres collectives que furent la Croix de Berny et le Roman des quatre, elle se trouve justifiée dans la naissance même du second de ces romans, calquée sur celle du premier. Roman épistolaire, une femme trois hommes ; une écrivine, trois écrivains. Les voici, dans l'ordre de présentation des Annales :
Paul Bourget
Gérard d'Houville (Marie de Heredia)
Pierre Benoit
Henri Duvernois
Les Nouvelles littéraires, artistiques et scientifiques reprennent l’information près d’une année plus tard il a bien fallu, entre temps, que nos quatre plumitifs aiguisent leurs plumes et remplissent nombre de feuilles de papier vierge. le numéro du 25 novembre 1922 nous apprend :
Le Roman des quatre.
C’est un roman par lettres dont les auteurs sont Paul Bourget, Gérard d’Houville, Henri Duvernois et Pierre Benoit et qui commencera à paraître le 25 décembre dans les « Annales ». Roman tour à tour gai et dramatique : Gérard d’Houville écrit les lettres d’une jeune fille ; Paul Bourget, celles d’un père ; Henri Duvernois et Pierre Benoit, celle de deux hommes de caractères différents. Ce roman ne devait pas être écrit, comme on l’a prétendu, « au mois le mois », et au cours de la publication dans les Annales. Les réunions ont lieu soit chez Gérard d’Houville, soit au restaurant Larue et il est à peu près terminé.
Quelques jours plus tard, le 28 novembre, dans Le Temps, Émile Henriot complète les informations :
COURRIER LITTÉRAIRE
Le Roman des quatre
Quatre amis, dont la connaissance avait, elle aussi, commencé par le Parnasse, s’étant réunis pour dîner ensemble, avec M. Adolphe Brisson, cinquième, et qui avait son dessein sur eux, décidèrent au dessert de collaborer et d’écrire un roman à eux quatre. L’idée était de M. Adolphe Brisson et c’est pour l’exposer à ses convives qu’il les avait priés à ce dîner. Il avait récemment relu un vieil exemplaire de la Croix de Berny, roman par lettres, et « steeple-chase à quatre coureurs », comme disait ce méchant drôle de Mirecourt. À cet ouvrage avaient autrefois collaboré, pour le faire paraître dans la Presse, Delphine de Girardin, Théophile Gautier, Méry et Sandeau. C’est ainsi que le directeur des Annales conçut le projet de renouveler cet exploit, et s’avisa de demander leur collaboration à quelques-uns de nos plus notoires écrivains contemporains Mme Gérard d’Houville, MM. Paul Bourget, Henri Duvernois et Pierre Benoit. Ce sont là nos « quatre », et l’équipe destinée à donner un pendant à cette fameuse, mais un peu oubliée Croix de Berny. Le projet, développé inter pocula, divertit beaucoup nos auteurs. Ils se mirent ensuite au travail, et, après quelques tâtonnements, en menèrent à bien l’exécution. L’ouvrage va bientôt commencer à paraître, aux Annales. Ce sera le Roman des quatre. C’est M. Brisson qui en eut l’idée. Mais c’est M. Paul Bourget qui, le premier pressenti, désigna ses collaborateurs : il se réservait la psychologie, Gérard d’Houville apporterait la grâce, Henri Duvernois la fantaisie et Pierre Benoit l’aventure. Il fallut d’abord se mettre d’accord sur le sujet. Un premier scénario envisagé ne convint pas à la moitié des collaborateurs, qui ne le sentaient pas. M. Duvernois, en trouva un autre, qui fut adopté. La première idée avait été que, le roman devant être un roman par lettres, pour donner aux lettres plus de vraisemblance et de vérité, chacun des auteurs n’écrirait les siennes qu’après avoir reçu celles de ses correspondants. Mais ce procédé était dangereux. Supposez que, pour faire une niche à Mme Gérard d’Houville, M. Paul Bourget eût, dès la troisième page, fait entrer son héroïne en religion, ou que, pour précipiter Duvernois dans un piège à loup, Pierre Benoit eût fait enlever son personnage principal par des sinn-feiners ? Le roman en tombait du coup.
Afin de parer à ces périls, toujours possibles de la part d’écrivains doués d’imagination, nos quatre auteurs décidèrent sagement de travailler, chacun de son côté, sur un canevas minutieusement établi au préalable par Henri Duvernois, l’ingénieux auteur d’Edgar. Il y a quatre personnages. Chacun des auteurs, entrant dans la peau de chacun d’eux, en fait un, de sorte que le ton du livre sera plus divers et plus vrai, plus plein de cette variété de style et de tour qui convient au roman par lettres. Le sujet, tel qu’on peut l’indiquer déjà sans nuire à la curiosité légitime du lecteur, est un drame familial. Il y a un père meurtrier, une jeune fille charmante, un aventureux prospecteur de mines, qui vit en Afrique, et un jeune roué parisien. Il y a un mystère. Il y a de l’amour. Il y aura aussi du remords, de la tendresse, de l’esprit, des aventures. Il y aura en outre pour le lecteur, l’agréable et piquant problème de se demander qui les y aura mis, et, en tournant les feuillets du livre, de se poser à chaque lettre, cette question, peut-être assez aisément résoluble « De qui est-ce ? »
L’idée est jolie. Elle sera sans doute imitée Il est même à souhaiter qu’elle le soit : c’est qu’elle aura mérité de l’être.
Émile Henriot.
Nous en savons assez maintenant pour trouver qui se cache derrière les quatre personnages principaux. Antoine Barge : Paul Bourget ; Micheline Barge : Gérard d’Houville ; Bernard Souchet : Henri Duvernois ; Lucien Huvelot : Pierre Benoit.
Après toutes ces précisions, et avant publication de l'œuvre à quatre, il ne restait plus qu’à prendre du recul et à traiter le sujet des romans à plusieurs auteurs de manière plus générale. Ce fut la tâche d’E. Thomas, le 6 décembre 1922, dans le périodique Istamboul publié — on s’en serait douté — à Constantinople :
Collaborations littéraires
Les Annales vont publier prochainement un roman, dont la principale originalité — nous saurons si c’est la seule — consistera dans le fait qu’il est issu d’une quadruple gestation. Ordinairement, on s’y met à deux. Cette fois-ci, les auteurs s’y sont mis à quatre. Et quatre d’importance : Paul Bourget, Henri Duvernois, Pierre Benoit et Mme Gérard d’Houville. Une équipe de choix, comme vous voyez. C’est, paraît-il, M. Adolphe Brisson qui eut l’idée de ce « steeple-chase à quatre coureurs », comme disait cette mauvaise langue d’E. de Mirecourt, en parlant de la Croix de Berny, ouvrage qui sortit naguère, dans des conditions identiques, des plumes conjuguées de Delphine de Girardin, Th. Gautier, Méry et Sandeau. Il ne parait pas que la Croix de Berny ait bravé victorieusement les dédains de la postérité, car il y a certainement peu de gens qui connaissent ce livre et surtout qui le lisent aujourd’hui. Le Roman des quatre, qu’on nous annonce, aura-t-il une plus brillante destinée ? Nous saurons cela dans un demi-siècle. Mais on peut prédire à coup sûr à l’œuvre nouvelle, dès son apparition, un succès de curiosité.
Et, une fois de plus, les chroniqueurs vont se demander comment s’opère ce travail en commun, comment ceux qui y participent se partagent la besogne, comment l’unité peut se faire entre des efforts si divers.
Dans le cas présent, des indiscrétions nous apprennent que le canevas du roman a été soigneusement établi par M. Henri Duvernois. Il y a quatre personnages principaux. Chacun des auteurs, entrant dans la peau de l’un d’eux, en a fait un, d’où, sans doute résultera une agréable variété dans la peinture de ces personnages. Et ce pourra être un petit jeu de société de mettre derrière chacun des protagonistes de l’œuvre le nom du romancier qui l’a peint.
Le secret des collaborations ? Il n’y en a pas, ou plutôt il y en a mille. De même que les auteurs travaillant seuls sont loin de procéder tous de la même manière, de même ceux qui créent en collaboration n’usent pas d’une méthode unique. Quelques-unes de ces méthodes sont un peu singulières, par exemple celles des frères J. H. Rosny (Justin et Henry), qui s’est poursuivie pendant plus de vingt ans et qui a donné des fruits magnifiques. À un reporter qui lui demandais un jour comment ils procédaient, J. H. Rosny aîné répondit : « Mon frère est, en ce moment, au Cap Breton, où il passe la plus grande partie de l’année. » Et, sur un signe d’étonnement de son interlocuteur, le romancier ajouta : « Mais oui ! Mon frère et moi n’avons nullement besoin d’être ensemble pour collaborer. Nous avons les mêmes visions, les mêmes sensations et une manière identique de les traduire.
« Pour travailler au même roman, nous nous communiquons un plan, puis nous partageons la besogne, chacun de notre côté. Il y a certains de nos livres qui comportent cent ou cent cinquante pages écrites d’affilée par l’un de nous, sans que l’autre ait connu, autrement que par le plan succinct dont je vous parlais tout à l’heure, ce qu’elles contenaient... Nos tâches respectives achevées, elles sont centralisées entre les mains de l’un ou de l’autre, qui fait les soudures forcément nécessaires. Voilà exactement dans quelle mesure nous nous concertons. »
Au contraire la collaboration des Tharaud est une des plus étroites, des plus intimes qui soient. On le devinerait du reste à priori, tellement leur œuvre apparaît comme une construction d’un seul tenant, sans aucun de ces interstices révélant le travail d’outils différents.
C’est qu’en effet Jérôme et Jean ne se séparent guère et tout leur labeur se fait en commun, avec une conscience, une minutie que les jeunes improvisateurs de vingt ans auraient intérêt a méditer.
Quand ils ont en vue un sujet, ils commencent, en de longs entretiens, par en causer avant d’en rien écrire. Ils s’expliquent l’un à l’autre, se communiquent mutuellement leurs impressions et leurs idées, de façon à réaliser parfaitement l’identité « d’imprégnation ». Une fois d’accord sur la matière même du roman, ils en déterminent la ligne, s’efforçant d’en mener le récit de la façon la plus directe. Alors, mais alors seulement, ils passent à la rédaction. L’un parle, l’autre écrit, le second interrompant le premier pour ajouter à sa dictée. La copie ainsi obtenue — rudis indigestaque moles — le premier la reprend à son tour, ajoute, coupe, lime. Ainsi de suite : chaque copie relue et corrigée à haute voix. Certains de leurs ouvrages ont, de cette manière, été récrits quinze ou vingt fois. Ce qui n’empêche pas les Tharaud de les reprendre et de les amender après l’impression. Dingley, l’illustre écrivain, a été publié sous trois versions différentes, la dernière relativement récente.
Quant aux frères Ficher — Max et Alex — écoutez les exposer leur manière de collaborer : « Comment nous travaillons ? Voici : en riant aux éclats, quand ça va bien, en nous disputant comme des députés lorsque ça ne va qu’à moitié... Regardez bien autour de vous : vous n’apercevez aucun objet en porcelaine, n’est-ce pas ? C’est que nous avons fini par remarquer que les objets en porcelaine, lorsqu’on se les lance à la tête, ont mauvaise habitude de se briser. »
Moins joyeuse et moins turbulente sans doute était la collaboration des Goncourt. Avec eux c’est la collaboration juxtaposée, la collaboration mosaïque, dans laquelle l’apport de chacun est aisément discernable... Mais cela nous fait penser que les Dix doivent se réunir ces jours-ci pour décerner leur prix annuel. Ce sera une occasion de reparler un peu des Goncourt, de leur académie et de leur fameux Journal. C’est un sujet qui en vaut bien un autre.
E. Thomas
Le 10 décembre 1922, dans leur no 2059, un gros numéro de Noël, Les Annales commencent la publication du Roman des quatre en épisodes, avec des illustrations de J. Touchet.
Bandeau de titre du premier épisode
Illustration de J. Touchet
Après sa parution en revue, le roman sort en volume chez Plon. Le Gaulois, dans son numéro du 21 juin 1923, très prosaïque, ne s’occupe que du côté pécuniaire de cette future sortie :
En souscription :
Paul Bourget, Gérard d’Houville, Henri Duvernois, Pierre Benoit : Le Roman des quatre. Ex sur Chine : 50 francs ; sur Japon : 60 francs ; sur Hollande : 35 francs ; sur vélin Lafuma : 20 francs, et l’édition originale sur papier de fil : 10 francs.
Le dernier travail d’érudition autour du Roman des quatre et surtout de son modèle la Croix de Berny est dû à la plume de Jules Bertaut dans le numéro de Paris-Journal du 23 juin 1923 :
LE PASSÉ VIVANT
Le Roman des Quatre
C’est dans quinze jours que doit paraître le Roman des Quatre. On sait que cette œuvre est due à la collaboration de Paul Bourget, de Gérard d’Houville, de Henri Duvernois et de Pierre Benoit. Si, avec ces quatre noms illustres, le livre en question n’atteint pas la grosse célébrité et le gros tirage, ce sera, avouons-le, à désespérer de tous les lancements littéraires présents et futurs ! Il paraît, si nous en croyons les indiscrétions, que c’est M. Paul Bourget qui a imaginé le sujet et déterminé le plan de l’action, réservant à chacun de ses collaborateurs la possibilité d’« aménager » sa partie de concert comme il l’entendrait. Le tout est qu’on n’aboutisse pas à une cacophonie finale !
*
* *
C’est l’écueil sur lequel avait échoué une tentative du même ordre qui avait eu lieu sous le romantisme et qui s’appelle la Croix de Berny. Tout le monde, il y a cinquante ans, connaissait, au moins de nom et de réputation, la Croix de Berny. Tous les lettrés d’aujourd’hui l’ont lue et s’en souviennent.
Ce sont aussi quatre as littéraires de l’époque, Théophile Gautier, Mme de Girardin, Jules Sandeau et Méry qui eurent l’idée de se grouper pour écrire en collaboration une œuvre romanesque. Seulement, pour ajouter au mystère et piquer la curiosité des lecteurs, ils poussèrent le souci du secret jusqu à prendre des pseudonymes. Théophile Gautier devint Edgard de Meilhan ; Mme de Girardin signa Irène de Chateaudun ; Jules Sandeau, Raymond de Villiers ; Méry, Roger de Montbert.
Pourquoi ce titre : La Croix de Berny ? C’est qu’à cet endroit des environs de Paris venait d’avoir lieu la première course steeple-chase récemment importée d’Angleterre, et que cette innovation avait fait sensation.
« L’événement de la semaine, écrivait précisément Delphin Guy, en 1840, est le steeple-chase qui a eu lieu à la Croix de Berny. Tout le Paris élégant, le Paris prétentieux et le Paris anglais était réuni à cette fête. "Il y avait là tout ce qu’on connaît". Phrase favorite des gens qui, précisément, ne connaissent personne, ou qui, du moins, ne connaissent les hommes et les femmes à la mode que par leur nom. Mais cette foule brillante qui venait là pour applaudir et admirer n’a pu jouir que du plus désagréable de tous les spectacles, une tragédie ridicule, cinq gentlemen-riders s’élançant avec orgueil sur de magnifiques coursiers et tout à coup, après avoir fait cent pas à peine, disparaissant avec leurs montures dans un fossé plein d’eau... »
Telles étaient les premières émotions de la Croix de Berny. Elles enchantèrent tout de même les Parisiens et mirent à la mode pour un temps cette petite localité de la banlieue.
— C’est un roman steeple-chase que nous allons écrire, nous aussi ! avait déclaré la malicieuse Mme de Girardin dans son salon.
Et, comme ses trois complices, elle s’attaqua courageusement à la besogne.
Bientôt — est-il besoin de le dire ? — le voile de l’anonymat qui recouvrait quatre têtes illustres fut soulevé et l’on connut les noms véritables des auteurs du livre.
*
* *
Celui-ci parut dans les colonnes de la Presse, découpé en petites tranches quotidiennes, pour la plus grande satisfaction du public et des badauds et obtint un gros succès. Il n’en eut pas un moins éclatant en librairie et longtemps les cabinets de lecture s’arrachèrent la Croix de Berny. Cependant, déjà, les critiques avaient fait la moue Sous prétexte que le livre était anonyme, ou, du moins, signé de noms inconnus, les envieux, les petits journaux et les poltrons, qui n’osent pas attaquer en face, en profitèrent pour décocher aux uns et aux autres des auteurs des traits empoisonnés.
On se gaussa de Méry et de sa psychologie de l’amour, de cet amour qu’il proclamait gravement « le plus dur de tous les maux » et la cause des « supplices qui portent les noms les plus vulgaires et les plus innocents ». Les pages nerveuses et même spirituelles qu’il répandit dans l’œuvre commune et qui formaient comme autant de « morceaux de bravoure » (la poste restantes, les mœurs d’Orient, la fameuse lettre du prince plein de jalousie et de colère) ne trouvèrent pas grâce devant les petits aboyeurs, lesquels s’en donnèrent à cœur joie de déchiqueter sans risque cette prose proclamée la plus belle de la langue française, — après celle de Jules Janin !
Toutes ces polémiques nous paraissent, à distance, un peu puériles et avouons que la Croix de Berny nous ennuie pour les passages et les qualités mêmes qui la faisaient trouver charmante aux contemporains des auteurs.
Nous souhaitons prospérité et longue vie à la collaboration des Quatre de 1923.
Jules Bertaut.
Le Roman des quatre arrive en librairie le 11 juillet 1923.
On pourrait penser que l’histoire du Roman des quatre s’arrête là. Et on se tromperait grandement. Trois ans plus tard, en 1926 donc, les quatre auteurs — dont une auteuse — donnèrent une suite au roman. Ils reprirent chacun leur personnage pour un tome 2 (et dernier) : Micheline et l’amour. Si l’on en croit l’achevé d’imprimer de ce second volume, il vit le jour le 10 avril 1926.
Est-ce la fin de ces billets sur les romans à plusieurs plumes ? Peut-être pas...
En attendant voici les liens vers les billets passés qui traitent du même sujet. On n'est pas des chiens, ici, on vous évite de chercher :
Nobody gave a comment yet.
Be the first to do so!
Undergrowth typography
Typographical practice
Typo des rues
The picture of the day...
Tales ans short stories
Streets typography
Rural typo
Proverbs
Printing
Post-competition
Places of conviviality
My masters
Internal news
Friends
Fourneau-Fornax
External news
Editorial practice
Competition
Bookish teratology
Book-collecting
Bibliophilie
Art
Alphabet
Fornax éditeur 18, route de Coizard, F51230 Bannes – France